Le texte La Fête a été écrit dans le cadre d'un atelier d'écriture de l'Agence Culturelle d'Alsace, et figure dans le recueil collectif Huit petits débordements.
Un extrait du texte:
"
Hier soir en sortant du boulot, je
suis allé boire une bière avec un collègue, et c'est là que je
les ai aperçus. J'avais passé la journée à faire de la
maintenance informatique, à essayer de récupérer des fichiers
clients après le plantage du serveur, j'étais un peu à cran, et
Matthieu, mon collègue, avait trouvé que ça nous ferait du bien
une bonne bière après cette journée pourrie. J'ai laissé Matthieu
s'installer et je suis allé passer la commande. Je me suis mis à
regarder tous les types et les nanas de la salle en attendant le
serveur. J'ai observé longtemps les allées et venues des gens,
leurs tenues, écouté les conversations de la table d'à côté.
C'est au moment où le serveur m'a demandé ce que je voulais que je
les ai aperçus. Ils étaient installés à une table sur le côté.
J'ai tout de suite reconnu Alex. Y a eu quelque chose dans sa façon
de lever la tête, de regarder autour de lui, de saisir sa bière.
Sébastien, j'ai mis un peu de temps. Il était avachi dans un
fauteuil défoncé, et j'ai d'abord pensé qu’il était trop gros
pour que ce soit lui. Et puis son visage d'adolescent est réapparu
sous des traits déjà bouffis. Qu'est-ce qu'ils foutaient ici. Je me
suis détourné et j'ai bredouillé au serveur deux bières s'il vous
plaît. Je me suis dépêché de rejoindre la table où Matthieu
m'attendait, je voulais pas croiser leurs regards, j'ai à peine
répondu quand il a dit allez on trinque, j'ai regardé à nouveau
dans leur direction et je les ai vus qui m'observaient. J'avais déjà
le front en sueur, je commençais à me sentir mal. Matthieu me
regardait d'un air bizarre en me demandant ça va t'es sûr?
J’ai
pensé c’est pas possible que ces enfoirés soient assis à
quelques mètres de moi. Dans la même ville. Qu’est-ce qu’ils
foutent ici. Retrouver l’expression de leur visage, et encore plus
celle qu'ils avaient à 17 ans au lycée, ça m’a foutu un coup.
J'ai rien oublié, j'ai pas besoin de revoir leurs tronches pour me
souvenir de leurs mains sur moi, mais quand je les ai vus se diriger
vers notre table, Alex avec la même dégaine, le même dédain dans
son sourire, j'ai pas pu rester une minute de plus, je me suis mis à
suffoquer, j'ai dit à Matthieu, écoute, je me sens pas bien du
tout, je vais y aller, désolé hein. J'ai enfilé ma veste et je
suis parti, mais au moment de sortir du bar j'ai pas pu les éviter,
je me suis retrouvé nez à nez avec eux, et Alex a dit
tranquillement salut Tony, ça roule, ça fait un bail hein, c'est la
première fois que je te vois ici, tu viens souvent?"
©
Texte déposé
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